Le restaurant Le XXI à Rouen est né d’un constat, le constat de parents de jeunes porteurs de handicap mental, confrontés à l’entrée de leur enfant dans la vie active. À l’initiative d’Eric Van de Wynckele et avec le portage de l’association trisomie 21 Seine-Maritime Rouen, le XXI emploie, depuis un an, douze salariés porteurs de handicaps mentaux. Retour sur cette belle épopée. 

Interview réalisée le 15 septembre 2022

**Interview**

A 20 ans, c’est le néant !

Au départ, il y a Eric Van de Wynckele, père d’Albane, porteuse de trisomie 21. « A 20 ans, pour trouver un établissement c’est le néant », c’est par ces mots qu’il explique sa motivation première. Il a ensuite fallu la visite du restaurant Le Reflet de Nantes à l’occasion d’un déplacement professionnel, pour finir de le convaincre du bien-fondé du projet pour sa ville.

Il rentre alors à Rouen avec le projet sous le bras, qu’il monte avec l’association Trisomie 21 Seine-Maritime Rouen, dont il est vice-président et un collectif de parents convaincus. Aujourd’hui, cette équipe soutient bénévolement le projet, en complément de leurs activités respectives : Eric, aux Relations institutionnelles, Bertrand aux Finances, Julien aux Ressources humaines, et Laëtitia, fondatrice de la marque Ouais et alors, à la Communication.

Le restaurant permet d’apporter une réelle solution aux adultes

 

L’association Trisomie 21 Seine-Maritime Rouen proposait jusqu’alors aux personnes accompagnées un service Sessad* à 55 jeunes de 0 à 20 ans et un SAT hors les murs** à environ vingt jeunes.

Pour l’association, le restaurant permet d’apporter une réelle solution d’emploi, aux personnes accueillies en IME après 20 ans pour faute de place dans les structures adultes, aux personnes hébergées en foyer de vie sans orientation professionnelle malgré leurs capacités et aux personnes en recherche d’emploi, souvent depuis de nombreuses années.

Le projet ne s’est pas monté en un claquement de doigts 

 

Comme le rappelle Eric Van de Wynckele, le projet ne s’est pas monté en un claquement de doigts ! C’est en 2018 que l’aventure a débuté. Il a fallu trouver le lieu, les financements, le chef de cuisine, etc. Comme beaucoup de restaurants, le XXI aurait pu rester sur le carreau du Covid. Le fonds de commerce, acheté juste avant la pandémie, est resté inexploité pendant deux ans et demi, alors que les loyers couraient… Sans chiffres d’affaires antérieurs, pas d’aide Covid… Cette période a fortement pesé sur la trésorerie de l’entreprise.

La clé : constituer une trésorerie solide !

 

Heureusement, le 21 juin 2021 tout un symbole, Le XXI a pu ouvrir ses portes, suivi début juillet par la visite en grandes pompes de la secrétaire d’État en charge des Personnes handicapées, Sophie Cluzel. Même si cette première année s’est résumée à cinq mois d’activité seulement, Eric Van de Wynckele en dresse un bilan plutôt satisfaisant sauf au niveau trésorerie bien sûr. 

L’année fut ponctuée par la formation des équipes durant l’été, la deuxième vague de Covid dès novembre, deux mois à peine après la rentrée de septembre, le déploiement d’une activité de traiteur pour compenser les difficultés, une activité de restauration, cyclique par nature… Pour lui, la clé reste de constituer une trésorerie solide, d’au moins deux mois, afin de faire face aux imprévus. Il aime à rappeler les fondamentaux pour une telle entreprise : « Une activité rentable économiquement, sans aides. ».

Une aide au poste pour les douze employés porteurs de handicap 

Le XXI est une SAS*** sous agrément Entreprise adaptée****, ce qui lui permet de bénéficier d’une aide au poste pour les douze employés porteurs de handicap. A leurs côtés, cinq salariés ordinaires occupent les postes de cheffe de salle, chef cuisine, second, chargée d’insertion et chef traiteur. Les salariés porteurs de handicap sont sous contrat en CDI de 20 heures par semaine, répartis sur trois jours consécutifs : une équipe du lundi au mercredi, la seconde du jeudi au samedi.

Une rotation s’effectue tous les mois. Chaque équipe de six est ensuite répartie pour moitié en salle et pour moitié en cuisine. Le restaurant, à présent lancé, des formations professionnelles complémentaires pour toute l’équipe sont programmées dans les mois à venir.

Avoir un boulot comme tout le monde !

 

Le bénéfice pour les employés n’est pas à démontrer. Malgré une première année chaotique, l’équipe constate déjà les premiers bénéfices personnels : autonomie dans les transports, prise de parole en public, affirmation de soi, emménagement en appartement personnel, etc. Une réelle confiance en soi constatée chaque jour qui se résumerait en un cri du cœur « Avoir un boulot comme tout le monde ! »

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* Un Sessad est un Service d’Education Spéciale et de Soin à Domicile qui permet un accompagnement de l’enfant ou de l’adolescent grâce à une équipe de professionnels tels que des psychomotriciens, des orthophonistes, des éducateurs spécialisés ou des psychologues.
** Un SAT Hors les murs est un Service D’Aide par le Travail qui favorise l’insertion professionnelle de personnes trisomiques ou déficientes intellectuelles au sein d’entreprises de secteurs d’activité variés ou de collectivités, qu’elles soient locales ou territoriales.
*** Une SAS (société par actions simplifiée) est une entreprise ordinaire.
**** L’entreprise adaptée est un agrément pour une entreprise du milieu ordinaire qui emploie au moins 55 % de travailleurs reconnus handicapés dans l’effectif de l’entreprise.

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